Intérêt des logiciels outils


Alors qu'avec les exercices l'élève était en situation d'exécuteur de tâches proposées par l'ordinateur, la situation va être inversée avec les outils : c'est l'élève qui demandera à l'ordinateur d'exécuter certaines tâches, calculs ou dessins. Il se trouve donc en situation de dialogue, ceci implique un contenu à communiquer, mais aussi l'utilisation d'un langage adapté et la capacité d'interpréter les réponses obtenues pour être en mesure de poursuivre le dialogue.

Sommaire :


  1. Nécessité de la rigueur
  2. Ce dialogue entre élève et ordinateur est caractérisé par le fait qu'il est établi non pas avec une personne humaine (autre élève ou professeur) mais avec un ordinateur, ou plus exactement avec un logiciel. Cela signifie que le champ des messages adressables et des réponses fournies a été préalablement codé, et qu'il n'est pas possible de sortir d'un cadre imposé. Une certaine rigueur est donc nécessaire. Il ne s'agit pas de la mythique rigueur des mathématiques au nom de laquelle le professeur impose des démarches dont les élèves perçoivent mal l'intérêt (écrire telle ou telle phrase magique, ne pas oublier des crochets, ...) et qui est finalement mal acceptée par les élèves parce qu'elle ne peut être efficacement justifiée qu'en référence à des considérations qui les dépassent. Il s'agit au contraire d'une rigueur beaucoup plus matérielle qui tient au fait qu'on n'utilise pas un outil n'importe comment, on se réfère au mode d'emploi. La rigueur est nécessaire pour aboutir à un résultat, pas pour faire plaisir au professeur.

  3. Esprit d'analyse
  4. Le dialogue engagé avec l'ordinateur se fait par l'intermédiaire de messages qui lui demandent d'effectuer une tâche précise (dessiner une figure, effectuer un calcul ou une suite de calculs). Cette tâche doit avoir un intérêt intrinsèque (faire un beau dessin, étudier une situation géométrique, résoudre un problème numérique, relever un défi, ...). Mais il est aussi nécessaire qu'elle ne soit pas réalisable de façon immédiate, un travail de décomposition en tâches élémentaires et de structuration sera nécessaire. Il dépendra essentiellement des caractéristiques du logiciel utilisé, c'est à dire des actions élémentaires qu'il permet et de sa façon de les regrouper pour aboutir à des résultats plus complexes. C'est donc un véritable travail d'analyse d'une situation que l'élève devra fournir.

  5. Construction de figures géométriques
  6. L'exemple de la construction de figures géométriques est de ce point de vue particulièrement intéressant. La plupart des élèves ont une vision globale des figures, ou plutôt de la forme des figures. La difficulté qu'ont certains élèves à construire une figure à partir d'une suite d'instructions simples peut s'expliquer par le fait qu'ils pensent ne pas comprendre ces instructions tant qu'ils ne s'ont pas capables de voir la figure terminée, d'imaginer sa forme. Le carré est par contre considéré comme une figure très simple car sa forme est reconnue depuis de nombreuses années pour un élève de collège et donc très familière. Ses nombreuses propriétés font partie de sa forme et existent donc de façon immédiate. Dessiner avec un ordinateur va obliger l'élève à reléguer cette notion de forme au second plan. Elle ne sera plus première et immédiate, mais le résultat d'un ensemble d'actions ordonné qui formera un programme de construction. La figure ne sera plus un tout indivisible qui se suffit à lui-même et à propos duquel il y aura peu de choses à dire et donc peu de matière à réflexion. Elle sera un ensemble de points, de segments, de droites et de cercles qui apparaissent dans un ordre donné et qui sont liés entre eux par certaines propriétés. Dès lors, celles-ci peuvent être classées en deux types : celles qui ont été explicitement imposées par le programme de construction et celles qui apparaissent en plus, comme un bonus. Les notions d'hypothèses et de conclusion commencent à émerger. Un ordre est apparu (il y a pour chaque élément un avant et un après) donnant un nouveau sens à la figure. Modifier cet ordre c'est modifier la figure, même si sa forme finale est inchangée. Par exemple, on ne fera pas la même construction pour dessiner un rectangle en partant de deux sommets consécutifs ou en partant de deux sommets opposés.

  7. Utilisation de variables et de formules
  8. Si nommer un élément géométrique en utilisant une lettre (ou un mot) ne pose en général pas de difficultés, il n'en va pas de même avec les nombres. Cette idée apparaît généralement pour écrire des formules (par exemple de calculs d'aires) que l'on devra apprendre par coeur. Son intérêt semble alors se réduire à être un simple moyen mnémotechnique pour mémoriser une suite de calculs à effectuer. Il est bien rare que l'on ait à écrire ses propres formules avant de s'essayer aux exercices de mise en équation où les problèmes surgissent. Le problème est que la suite de calculs que l'on écrit ne doit pas être effectuée immédiatement, elle n'est là que pour montrer une relation entre nombres et c'est avec cette relation qu'il faut travailler. L'utilisation d'un tableur ou l'écriture de petits programmes de calcul permettra de mettre en évidence l'importance des notions de variables et de formules qui les relient. Elles jouent un rôle essentiel pour éviter de répéter un grand nombre de fois le même calcul et donc exprimer des procédures générales.

  9. Expérience et esprit critique
  10. Lorsqu'un message a été envoyé à l'ordinateur, celui-ci le traite et émet un nouveau message en retour qui peut prendre diverses formes : figure, tableau, résultat d'un calcul, ... Il faudra lire et interpréter ce message en se demandant d'abord s'il correspond bien à ce qu'on voulait demander. L'ordinateur peut d'abord renvoyer un message d'erreur qui signale un problème de syntaxe, il faut relire le message initial pour y retrouver les erreurs de frappe, les fautes d'orthographe ou les divers barbarismes. Ensuite lorsque le contact avec l'ordinateur a été correctement établi, c'est à dire lorsque le message envoyé a pu être interprété, il faut comparer le résultat obtenu à l'objectif visé. Des différences peuvent apparaître de façon immédiate, il faut alors les analyser, revenir au message initial pour le corriger et faire un nouvel essai. Enfin il faudra tester la généralité du résultat obtenu en modifiant certaines données. Pour une construction de figure cela se fera en déplaçant certains points, pour un algorithme en changeant les valeurs initiales. Le va et vient incessant entre message envoyé et résultat obtenu se fait, grâce à l'ordinateur, de manière très rapide. Il permet d'avoir une véritable démarche expérimentale.

  11. Vision dynamique des mathématiques
  12. La rapidité de réaction de l'ordinateur permet d'appliquer de nombreux changements à une situation initiale et de voir immédiatement leurs conséquences. Certaines notions mathématiques se trouveront ainsi enrichies. Les figures obtenues avec un logiciel de construction géométrique ont la particularité de pouvoir bouger tout en conservant les propriétés qui ont servi à leur création. Dès lors, elles apparaissent plus comme un ensemble de possibilités diverses que comme un simple dessin. Ce qu'on y lie n'est pas attaché à un cas particulier (le dessin de ma feuille ou celui du tableau) mais à la multitude de cas particuliers que l'on voit apparaître immédiatement en utilisant la souris. Une propriété sera intéressante lorsqu'elle est conservée malgré ces changements, lorsqu'elle montre un invariant. Dans le domaine numérique, les formules vont aussi pouvoir apparaître comme représentant une multitude de résultats possibles en étant concrétisées par des tableaux ou des listes. Résoudre une équation, qui devient très vite pour les élèves une suite de petites manipulations sur des égalités, va pouvoir reprendre son sens premier. Il s'agira de rechercher parmi tous les résultats possibles ceux qui répondent à l'égalité proposée ou s'en approchent le plus possible. Il faudra donc étudier des listes de nombres en modifiant le point de départ ou le pas pour se rapprocher d'une solution. Les notions d'encadrement et de variations (croissance ou de décroissance) apparaîtront de façon naturelle.

  13. Pour conclure
  14. L'utilisation des outils LiliMath permet de proposer une nouvelle approche de notions importantes en Mathématiques, d'une part en leur donnant un sens immédiatement accessible car fondé sur une nécessité immédiate, d'autre part en mettant en évidence leur généralité grâce à la possibilité d'exhiber rapidement de nombreux cas particuliers. La situation de dialogue qu'elle induit, l'aller-retour incessant entre ses demandes et les réponses fournies par l'ordinateur, amènent l'élève à avoir une véritable démarche expérimentale qui nécessite à la fois rigueur, créativité et esprit critique.


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